Réseaux sociaux : les médecins moins timides

13 mars 2019 Réseaux sociaux

Facebook, Twitter, LinkedIn, Snapchat… les médecins s’approprient peu à peu les réseaux sociaux grand public. Certains se développent aussi spécifiquement à leur intention.

« Pas le temps !! Secret médical !! Timide !! ». « Trop peur d’être jugés par les autres ». « Pas aussi libre pour échanger sur le Net qu’en vis-à-vis ». « Peur de la traçabilité virtuelle ». « Impression de se rajouter du travail et peu d’espoir d’en tirer des échanges ou des infos ». « Pour communiquer, il faut faire un effort, or la plupart des contributeurs n’y viennent que pour faire reluire leur ego ». Fin 2014-début 2015, les médecins français semblaient bouder les réseaux sociaux, si l’on en croit les commentaires laissés par différents praticiens sur le site mesconfreres.fr*.

Ces derniers répondaient à une question sur leurs « e-habitudes » posée par le Dr Dominique Dupagne, fondateur du site et lui-même très investi sur Twitter. Inscrit depuis 2009, il a en effet tweeté plus de 23 400 fois et revendique désormais plus de 12 800 followers. Les médecins ont-ils changé d’avis en 2019 ? Pas vraiment, selon « @DDupagne », qui estime que les arguments et les ressentis de ses confrères sont toujours d’actualité voire « de plus en plus d’actualité ».

Quelques afficionados

Certains, toutefois, ont intégré les réseaux sociaux dans leur quotidien. Plus ou moins connus, ils sont syndiqués, médecins-journalistes ou tout simplement adeptes des nouvelles technologies. Gérald Kierzek, médecin urgentiste et chroniqueur santé sur LCI, est chaque jour présent sur Twitter, où il fédère une communauté de plus de 11 000 abonnés, par exemple. Didier Mennecier, bloggeur à ses heures, officie sur la Toile sous le pseudo « Médecin Geek ». Présent sur Twitter depuis 2012, il partage des actus en santé auprès de ses 3800 abonnés. Il a même créé un site Web, un compte Twitter et un compte Facebook « Hepatoweb » pour « aider les patients et compléter le savoir de ses confrères », notamment en hépatologie, gastroentérologie et alcoologie.

D’autres partagent plutôt leur quotidien sur leur blog et les réseaux sociaux, comme Jaddo. Au total, plus de 21 900 personnes suivent sur Twitter les péripéties de cette femme médecin généraliste, des histoires « brutes et non romancées », « sinon c’est pas rigolo ».

Un côté « pratique »

Jean-Jacques Fraslin, médecin généraliste à Bouguenais dans le sud de Nantes, comptabilise quant à lui plus de 9100 followers sur le réseau de micro-blogging. « J’y suis depuis plus de dix ans, résume-t-il. J’y suis resté car cela se passe bien. J’ai une bonne communauté d’amis, des gens que je suis depuis longtemps : des médecins, des pharmaciens, des infirmiers… Tous ont un profil plutôt scientifique. » Il passe « une heure par jour » sur ce réseau social qu’il juge « pratique », facile d’utilisation et doté d’un bon moteur de recherche. C’est le seul dont il se sert. Il y lit des infos en santé, médecine et science ; en relaie lui-même.

Il tweete sous son propre nom et ne craint pas les messages agressifs ou harcelants. « Le fait d’avoir de nombreux abonnés protège beaucoup : en cas de problème, nous pouvons être soutenu par notre communauté », évoque-t-il. Il compte aussi sur ses connaissances médicales et scientifiques pour argumenter et lutter contre les fake news qui inondent le Web.

Dr Fraslin

Des liens avec les confrères

« J’échange aussi beaucoup avec mes confrères, via des messages publics ou des messages privés, selon le cas », explique-t-il. Pour leur adresser des messages de soutien ou pour les consulter, par exemple. En effet, il n’hésite pas à demander leur avis à des spécialistes en cas de problème diagnostique ou thérapeutique qui, par ce biais, « répondent assez vite », références bibliographiques à l’appui, pour l’aiguiller dans ses recherches. « Je m’en sers aussi pour prendre rapidement des rendez-vous auprès de praticiens que je connais, poursuit-il. Je leur envoie un message privé en expliquant pourquoi je requiers un rendez-vous urgent pour l’un de mes patients, en imagerie ou en cardiologie, par exemple. Avec Twitter, tout va très vite. »

Il a même utilisé le réseau social pour trouver un remplaçant dans son cabinet libéral. L’idée a germé faute « de proposition après un mois de parution sur des sites de remplacements ». L’initiative a été évoquée dans la presse (Ouest-France), ce qui lui a notamment permis d’être contacté par quelques jeunes médecins, mais « par téléphone », pas par Twitter, précise-t-il.

Au-delà de Twitter

Sur Instagram, un médecin urgentiste et une photographe, par exemple, témoignent des conditions de travail des praticiens urgentistes sur le compte Instagram « Mots d’urgentistes ». Un interne en première année de médecine, via son compte « Et Ça Se Dit Médecin », raconte quant à lui son quotidien à ses 19 400 abonnés. Autre réseau social mais même principe : sur Snapchat, un étudiant de 5e année a, dès 2017, créé un compte pour raconter son quotidien au sein de la faculté de médecine et du CHU de Créteil.

Instagram Et ça se dit médecin

À l’étranger, certains chirurgiens anglo-saxons vont plus loin et n’hésitent pas à filmer puis diffuser leurs opérations via les réseaux sociaux pour démystifier leur profession, enseigner, voire… pour se faire de la publicité et attirer de nouveaux clients (pratique autorisée Outre-Atlantique et Outre-Manche). C’est notamment le cas du chirurgien Shafi Ahmed (Royaume-Uni), du chirurgien esthétique Michael Salzhauer, alias « Docteur Miami » (Floride) encore de la dermatologue Sandra Lee, aussi connue sous le nom de « Pimple Popper » (Californie)…

Réseaux professionnels

Enfin, d’autres réseaux sociaux existent, dont les finalités sont différentes. LinkedIn, plutôt orienté « carrière », est ainsi propice aux offres d’emploi, y compris pour les médecins. De plus, au-delà des réseaux sociaux « mainstream », des réseaux dédiés aux médecins ou plus largement aux professionnels de santé, afin que ceux-ci puissent partager, échanger sur leurs pratiques médicales et s’entraider, fleurissent sur le Web. Parmi eux : Melting Doc, Esanum, Medpics ou encore HeyDoctor.

*Plate-forme destinée aux médecins souhaitant partager leur carnet d’adresses professionnel avec leurs pairs.

Attention danger !

L’usage des réseaux sociaux doit évidemment se faire dans le respect des règles déontologiques et juridiques : il ne doit pas se faire au détriment du secret médical. Les messages postés ne doivent pas non plus être diffamants ou insultants ni inciter à la haine, bien entendu.
Les réseaux sociaux peuvent par ailleurs avoir un impact négatif sur la réputation des médecins (avis ou propos désobligeants d’internautes, etc). L’Ordre a donc publié, en septembre 2018, un guide pratique pour accompagner les médecins dans la gestion de leur e-réputation et leur donner des solutions pour régler d’éventuels litiges.

Quelques médecins qui cartonnent sur les réseaux sociaux

Sur Twitter :
Laurent Alexandre, chirurgien-urologue, essayiste, Président de DNA Vision, une société spécialisée dans le séquençage du génome @dr_l_alexandre
Jacques Lucas, Premier Vice-Président du Conseil national de l’Ordre des médecins @Jcqslucas
Dr Gérald Kierzek médecin et chroniqueur santé sur LCI @gkierzek
Didier Mennecier créateur de @Hepatoweb 
Jean-Jacques Fraslin, médecin généraliste à Bouguenais dans le sud de Nantes @Fraslin
Et Ça Se Dit Médecin @ecsdmed
Shafi Ahmed @ShafiAhmed5
Jaddo @Jaddo_fr

Sur Instagram :
Michael Salzhauer Docteur Miami @TheRealDrMiami mais aussi sur https://www.instagram.com/therealdrmiami
Et ça se dit Médecin : https://www.instagram.com/ecsdmed

Certains hashtags sont également populaires sur le réseau :
#NoFakeMed
#DocTocToc
#BalanceTonHosto

Sur Facebook : Vie de Carabin

Parmi les blogs :
Alorsvoila.com, de Baptiste Beaulieu
Atoute.org, de Dominique Dupagne
Farfadoc.wordpress.com, « médecin généraliste installée dans une petite ville de campagne dans le 44 ».

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