Démocratie sanitaire : en médecine de ville, « apprendre à soigner autrement »

12 mars 2021 patrick bouillot

En ville aussi, la démocratie sanitaire se co-construit. Le Docteur Patrick Bouillot, membre de la commission permanente de la Conférence régionale de santé et de l’autonomie (CRSA) Bourgogne Franche-Comté, président du Conseil territorial de santé (CTS) du département de la Nièvre, illustre à travers son expérience comment le travail avec les patients amène les médecins à « soigner autrement ».

De quelle manière appréhendez-vous la démocratie sanitaire sur votre territoire ?

Dr Patrick Bouillot : C’est un échange. Qu’ils interviennent au niveau départemental ou régional, les représentants des usagers de la santé nous questionnent beaucoup sur l’organisation des soins et font remonter les problématiques des territoires.
Au sein des instances, des groupes de travail sont mis en place pour faire avancer des thématiques définies ensemble comme le droit des usagers dans les établissements de santé, la santé mentale, la démographie sanitaire, la gestion de la pandémie dans les EHPAD…
Tout l’enjeu est de faire évoluer le système de santé en tenant compte de l’avis et des propositions des usagers. Les discussions doivent aboutir à des prises de position commune.

Un vœu pieu ?

Dr Patrick Bouillot : La démocratie sanitaire s’est institutionnalisée mais la question de l’écoute et de la place accordées aux représentants des usagers de la santé dans les instances est récurrente. Évidemment, chacun doit rester à sa place, le médecin comme le patient. Mais les rapports doivent évoluer pour que nous passions d’une relation descendante à la co-construction des parcours de soins. Pour certains, c’est une culture récente qui doit encore être apprivoisée.

Quelles actions concrètes ont été menées ?

Dr Patrick Bouillot : L’une des Communautés professionnelles territoriales de santé de la Nièvre a prévu dans ses statuts la création d’un collège de représentants des associations d’usagers de la santé. Ils pourront participer aux assemblées générales et élire un représentant au conseil d’administration. Être inclus dans ce type de structures est une demande forte des usagers. Leur voix sera consultative et non délibérative.
Autre exemple, avant l’épidémie, les représentants des usagers de santé au sein du CTS ont souhaité travailler sur la prise en charge de la douleur. L’initiative aboutira à un symposium ouvert au public dès que cela sera possible. Il faut dédier des temps à la démocratie sanitaire accessible au plus grand nombre.

Quel est l’apport de cette démocratie sanitaire pour les médecins libéraux ?

Dr Patrick Bouillot : En tant que diabétologue-endocrinologue, j’ai toujours travaillé avec des associations de patients. Ma spécialité m’amène souvent sur le terrain l’éducation thérapeutique. Tout cela nous apprend à soigner autrement, à aider les patients à prendre leur traitement en main. L’expertise du médecin peut être majorée par l’échange avec le patient. Nous ne sommes pas que des techniciens, en particulier dans les spécialités cliniques où le temps d’échange avec le patient peut être long même s’il est peu valorisé dans les actes cotés. La démocratie sanitaire apporte la satisfaction d’évoluer dans son travail, d’être plus efficace et performant.
Les retombées se mesureront aussi dans la manière dont les soins vont s’organiser notamment parce qu’il y aura une meilleure le prise en charge du patient, plus précoce… Le bénéfice sera général pour le patient, pour le professionnel de santé, pour le système de soins qui sera sans doute plus efficient.

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