L’Ordre des médecins propose dix mesures pour construire l’avenir du système de santé

8 février 2017

Publié le 07.02.2017 par Clémence Nayrac
Article Hospimedia
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L’avenir du système de santé doit être pensé à partir des territoires. C’est en ce sens que l’Ordre des médecins a présenté ce 7 février dix mesures. Gouvernance partagée, décloisonnement de l’exercice professionnel et réforme de la formation en sont les grands axes. L’ordre attend des signaux fort de la part des candidats à la présidentielle.

« Construire l’avenir à partir des territoires. » Tel est le projet présenté ce 7 février par le Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom). Il s’agit en fait d’une troisième étape faisant suite à la grande consultation, lancée auprès des médecins courant 2015. Le Cnom avait en conséquence présenté un Livre blanc début 2016. Ce 7 février, il a dévoilé dix mesures phares présentées comme « la réforme voulue par les médecins ». Ces dix propositions ont vocation à inspirer les candidats à l’élection présidentielle puis aux législatives.

« Les candidats à la présidentielle n’ont pas pris la totale mesure de l’urgence à laquelle nous faisons face », avertit le Dr Patrick Bouet. Le président du Cnom dénonce « le recyclage de propositions. Le ministère de la Santé n’est pas une première marche au prix Nobel d’économie », poursuit-il. Pour l’ordre, l’avenir du système passe par un meilleur ancrage dans les territoires. Sa réflexion s’oriente en trois axes : « libérer le système, décentraliser le système et simplifier le système », martèle Patrick Bouet. Avec en filigrane un objectif, celui de « garantir un réel accès aux soins pour tous en tout point de notre territoire« . Et l’ordre de rappeler, par la voix du vice-président, le Dr Patrick Romestaing, les chiffres issus de la grande consultation : « 95% des médecins et 87% des patients souhaitent réformer en profondeur le système de santé ».


« Un système solidaire »

S’il refuse de commenter les programmes des candidats à l’élection présidentielle, le Cnom a tout de même apporté un éclairage ce 7 février. « Il est pour nous un dogme incontournable, c’est que l’Assurance maladie doit rester la porte d’entrée unique du système de soins», a reconnu le Dr Patrick Romestaing, vice-président du Cnom. Pour l’ordre, la solidarité doit rester la clé du système. Il le fera savoir aux candidats.


Une gouvernance partagée

Première ambition : simplifier l’organisation territoriale des soins avec une gouvernance partagée. Pour ce faire, l’ordre suggère la mise en place d’un échelon territorial unique en vue d’améliorer la coordination des soins. Il prône la création du Bassin de proximité santé (BPS). « Il est conçu en partant des besoins des populations sur un bassin de vie et basé sur les moyens et compétences disponibles, à l’inverse des organisations pyramidales et déconnectées des réalités du terrain qui ont trop souvent cours », détaille l’ordre dans sa publication. Ce BPS a pour objectif de sortir le praticien de son isolement et d’organiser la prise en charge globale du patient.

Il s’agit aussi, dans ces territoires, d’instaurer la démocratie sanitaire « à tous les niveaux ». Les BPS disposeront d’un comité opérationnel, placé sous la responsabilité des élus locaux des communautés de communes et regroupant les représentants de tous les professionnels de santé et des usagers. Ces comités devront analyser les besoins du territoire, évaluer les fonctionnements et dysfonctionnements ou encore piloter les actions locales. Les différents comités opérationnels, l’État et la région se synchroniseront via une coordination régionale. Au niveau de chaque bassin sera aussi créé un portail d’information unique entre acteurs de santé et usagers. Il doit permettre d’accroître la connaissance de l’offre de soins dans les territoires.

Décloisonner l’exercice médical

Deuxième priorité : alléger et décloisonner l’exercice professionnel des médecins. Le Cnom souhaite promouvoir et faciliter les coopérations inter et intraprofessionnelles. Plusieurs leviers sont à actionner dans ce sens comme la mise en place d’une meilleure coordination des soins avec le médecin traitant comme pivot ou encore l’encouragement à la mobilité entre médecine de ville et hôpital. « Les technologies numériques sont au premier rang dans les moyens qu’il faut donner sur l’ensemble des territoires », souligne Patrick Bouet. Le Cnom souhaite aussi plus de protection pour les médecins. « 98% des médecins ont estimé que le temps administratif est trop prégnant. Il faut leur donner les moyens de travailler plus efficacement avec plus de liberté », explique Patrick Romestaing. Il s’agit notamment de simplifier les relations avec les organismes gestionnaires en désignant un interlocuteur unique pour les médecins comme pour les usagers. L’ambition est ainsi de « permettre un système lisible et opérationnel pour tous », écrit l’ordre.

Réformer la formation

Troisième axe : ouvrir et professionnaliser la formation des médecins. L’occasion pour le Cnom de réitérer sa proposition de réformer le numerus clausus en le régionalisant. Il propose également une réforme de la première année commune aux études de santé (Paces) pour une « meilleure adaptation aux besoins du territoire ». L’ordre préconise de réfléchir à un système de présélection avant l’année de Paces pour limiter le taux d’échec. Les épreuves classantes nationales (ECN) devront aussi se muer en épreuves classantes interrégionales (Ecir), sur cinq grandes régions. « Les places disponibles seraient définies pour chaque grande interrégion et pour chaque spécialité, en fonction des besoins démographiques régionaux tels que remontés par le BPS », décrit le Cnom. Renforcer la professionnalisation du deuxième cycle jusqu’à l’internat et inciter les jeunes diplômés à un exercice volontaire dans les territoires sous médicalisés figurent aussi parmi les propositions. La professionnalisation passe enfin par le renforcement de la formation continue. Patrick Bouet glisse ainsi une nouvelle fois la proposition de « recertification dans la discipline » et suggère de développer les passerelles entres spécialités.

Ses propositions ainsi placées « dans l’espace public », l’ordre attend des réponses. Et des actes aussi. « Nous serons pugnaces, nous seront déterminés », insiste Patrick Bouet. La consultation se poursuit d’ailleurs. Dès ce 8 février, les médecins pourront choisir en ligne, parmi une trentaine de questions, celles qu’ils souhaitent voir poser aux candidats à la présidentielle. Le Cnom s’en fera ensuite le relais.

> Les dix propositions de l’Ordre des médecins (PDF)

 

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